jeudi 27 mai 2010

Ank ! Ang ! je suis un Oi sauvage - Le feuilleton parallèle

en deux langues et trois propositions, au théâtre Jean Arp, à Clamart
Un projet mené par Postures/Pascale Grillandini et Marianne Ségol
avec une classe de Nanterre, une classe de Clamart, une classe de Stockholm, leurs enseignants, le Théâtre Jean Arp et le Riksteatern de Stockholm (Suède).




En ces temps troubles et incertains pour la culture en Europe, j’ai le sentiment d’avoir vécu un moment rare le 25 mai dernier, au Théâtre Jean Arp, à Clamart, lors de la présentation du travail mené par Postures (P. Grillandini et M. Ségol), le Théâtre Jean Arp et le Riksteatern (Stockholm) sur toute la saison avec trois groupes de jeunes, en France et en Suède.
Prolongation naturelle des comités de lecture franco-suédois mis en place par Postures la saison dernière, et premier développement d’envergure d’Ank ! Ang !/bis (= le feuilleton parallèle), ce projet a bâti un espace artistique commun rare entre professionnels et amateurs. Via une fiction multiforme et multilingue préexistante mais toujours en cours d’écriture, tous les jeunes se sont frottés à la force de la dramaturgie, au plaisir des mots et de l’invention, développant ensuite à leur façon, personnelle ou en groupe, autant de ramifications possibles à ce monde des Ois et des rêves. Chaque texte a ensuite été traduit par M. Ségol en suédois ou en français afin que chacun découvre en amont le travail des uns et des autres.
Et ce que j’ai vu sur scène ce soir-là, ce sont trois groupes de jeunes qui, malgré leurs cultures différentes, partageaient un même plaisir du théâtre à travers lequel ils avaient, chacun et chacun, trouvé un moyen original de s’exprimer. N’est-ce pas ce que nous cherchons tous à transmettre et à partager ?
Je suis touchée par ce qu'ils ont écrit, aussi différent les uns des autres que ce soit. Touchée par la force de leurs fictions, par leur plaisir d'inventer, palpable, par leur humour, leur regard sur la vie, réelle comme invisible, et par l'intimité de leurs voix comme par la puissance dramaturgique créée par chaque groupe.
Pour eux aussi, le temps d'une année scolaire, les Oi ont existé, ces humains mutants qui sillonnent les cieux d'Europe en bandes migratoires polyglottes. Ils leur ont créé de nouveaux personnages absolument crédibles, surprenants, de tous âges, et quand je regarde la ville, je la vois peuplée maintenant de tous ces humains qui volent au-dessus de nous ou décollent soudain du trottoir où ils marchaient. Peuplée de toutes ces nouvelles POSSIBILITÉS. Certains meurent, abattus par des chasseurs ou broyés par des réacteurs d'avion, d'autres se font voler leurs ailes ou disséquer, d'autres tombent amoureux… ou pas. Et nous passons notre temps à sursauter : est-ce inventé ? est-ce possible ? où est la réalité ?
Ces deux feuilletons, l’officiel et le parallèle, vont continuer à se développer sur le long terme, chacun de leur côté, mais la richesse de leur rencontre a été telle sur ce projet que je leur souhaite encore beaucoup de croisements de cette force et de cette qualité. Et, à tous les jeunes participants, de garder longtemps en eux ce plaisir du théâtre d’aujourd’hui, de ce théâtre vivant qu’ils ont ressenti et su nous faire partager.

Karin Serres, mai 2010

* Ank ! Ang ! (je suis un Oi sauvage) est le feuilleton théâtral multilingue et multiplumes que j'ai lancé pour LABOO7. A ce jour, 6 épisodes écrits par K. Serres, D. Laucke, E. Uddenberg, S. Levey, F. Iacobelli et J. Caldas en français, allemand, suédois, italien et portugais.