mardi 28 décembre 2010
Tous Mongols !
Première semaine de répétitions de “Mongol“, la pièce, à Orthez, avec toute l'équipe. Un vrai luxe de répétitions tous azimuts, lectures, discussions, visionnages, partages… qui devrait être possible à chaque création, tellement c'est riche et profond…
Texte définitif début janvier, texte (version 4) publié à l'Ecole des Loisirs en mars, juste à temps pour la première…
jeudi 16 décembre 2010
Le goût de nos langues - Le Chant/Champ des Langues
(Reims Scènes d'Europe, vendredi 3 décembre)
Quel goût ont nos différentes langues, aujourd'hui,
de théâtre et d'Europe, destinées aux enfants et aux adolescents ?
Comment savoir où les découvrir,
et comment les lire, dans la plus grande richesse de leur altérité ?
Qu'est-ce qui s'écrit là, maintenant, pile en même temps que nous,
juste de l'autre côté de nos frontières ?
Et dans quel rapport à la scène, aux équipes qui vont les créer ?
Cette journée de "mise en appétit" organisée par Nova Villa et l'Onda a été riche de rencontres, prises de parole, récits d'expériences artistiques en tous genres dans ce vaste champ de nos langues destinées à la scène, au dialogue entre équipes artistiques et public, et sa progression toute en douceur, du panorama soulevé par de grandes questions transversales aux tables rondes plus concentrées sur les auteurs puis leurs passeurs, s'est achevée par la chair de nos langues mêmes, dans la haute salle du Palais du Tau, au pied des grandes statues de pierre qui ont écouté, comme le public en arc de cercle, toute la vibration de ces langues venues de pays étrangers, mais qui, par la grâce de la profondeur des échanges de cette journée, ne nous étaient plus si étrangères.
Quel goût ont nos différentes langues, aujourd'hui,
de théâtre et d'Europe, destinées aux enfants et aux adolescents ?
Comment savoir où les découvrir,
et comment les lire, dans la plus grande richesse de leur altérité ?
Qu'est-ce qui s'écrit là, maintenant, pile en même temps que nous,
juste de l'autre côté de nos frontières ?
Et dans quel rapport à la scène, aux équipes qui vont les créer ?
Cette journée de "mise en appétit" organisée par Nova Villa et l'Onda a été riche de rencontres, prises de parole, récits d'expériences artistiques en tous genres dans ce vaste champ de nos langues destinées à la scène, au dialogue entre équipes artistiques et public, et sa progression toute en douceur, du panorama soulevé par de grandes questions transversales aux tables rondes plus concentrées sur les auteurs puis leurs passeurs, s'est achevée par la chair de nos langues mêmes, dans la haute salle du Palais du Tau, au pied des grandes statues de pierre qui ont écouté, comme le public en arc de cercle, toute la vibration de ces langues venues de pays étrangers, mais qui, par la grâce de la profondeur des échanges de cette journée, ne nous étaient plus si étrangères.
jeudi 9 décembre 2010
Um abraço azul
Grande manifestation samedi 11 décembre 2011 autour du Teatro Municipal d'Amada, à Almada (Portugal).
A quoi sert le théâtre, surtout aujourd'hui ? A rester des humains, des hommes et des femmes, qui ressentent des émotions en tous genres, et non des machines, des robots, des esclaves broyés par la machine économique. Voilà pourquoi, plus que jamais, partout en Europe, il faut défendre les théâtres qui travaillent pour le public et leur donner les moyens de le faire bien. En particulier le grand théâtre bleu d'Almada, debout entre le ciel et l'eau, comme un immense bateau immobile, le grand château bleu au coeur duquel tant d'histoires fortes se répètent, nuit et jour, se racontent simplement, subtilement, et se partagent dans la plus grande ouverture. Samedi prochain, avec du bleu, je serai avec vous en pensée, et avec moi aussi, Marcia, Luis, Alvaro, Nuno et toute la foule de leurs fantômes plus vrais que la réalité nés sur le quai. Vive le grand théâtre bleu ! Longue vie au TMA !
Explication de ce mouvement :
En conséquence de sa politique de désinvestissement dann la Création Artistique, le Ministère de la Culture du Portugal a coupé 150.000 € dans la subvention au Festival d'Almada, dirigé par Joaquim Benite. Cette coupe, si le Ministère maintient sa position, aura des conséquences terribles dans la 28ème édition du Festival, qui est considéré le plus important festival international de théâtre au Portugal, et un des plus importants dans l’Europe.
Following a policy of disinvestment in the Artistic Creation, the Portuguese Ministry of Culture cut 150.000€ in its subsidy to the Festival de Almada, directed by Joaquim Benite. This cut, if the Ministry maintains its position, will have tremendous consequences on the 28th edition of the Festival, which is considered the most important international theatre festival in Portugal and one of the most important in Europe.
Siguiendo su política de disminuir el apoyo a la Creación Artística, el Ministerio de la Cultura de Portugal cortó 150.000 € en el subsidio al Festival de Almada, dirigido por Joaquim Benite. Este corte, si el Ministerio mantiene su posición, tendrá consecuencias tremendas en la 28ª edición del Festival, que es considerado el más importante Festival internacional de teatro en Portugal, y uno de los más importantes en Europa.
Pour soutenir leur combat : imprensa@ctalmada.pt
mardi 30 novembre 2010
Seules dans le château bleu
Première passionnante semaine de répétition de Marzïa au TMA d'Almada.
Je dors dans l'appartement du théâtre, seule dans le château bleu.
Comme Marcia, seule dans sa piscine abandonnée, mais habitée, no fim do fim do cais.
En portugais, jouer se dit : brincar, jogar ou representar, selon le sens recherché.
Archipel 1
Voyage en purée de pois. Les portes battent à chaque cahot, dehors la campagne est plate et invisible, bue par le brouillard, et les chevaux noirs, les tonnes à eau et les arbres. Un œil rond rose tyrien, l’eau tranquille, des caravanes emmêlées, des bouts de sacs accrochés aux branches. Des vaches blanches et laineuses comme des jouets posées dans la terre par un enfant géant. Le cou tordu des lampadaires d’alu à tête de dinosaure cyclope. 3V. 6V. 9V. Un cheval et sa couverture sur le dos. La porte du train qui bat, qui bat. Un paysage hors du temps. Qui marche dans ces chemins mouillés ? Quels mots restent accrochés dans buissons, sur les troncs embrumés ? Poteaux blancs rouillés, prés, prés, prés. Brume à nouveau, tout nappé, flouté, effacé. Le train nous balance dans tous les sens. Le vert, le vert des prés et le roux de leurs coutures d’arbres et de haies. Dès que la terre penche, on replonge dans la brume opaque et ses ombres chinoises de verre sablé. Une nuée suspendue d’oiseaux blancs étoilés, arrêté, en suspens, dessinant un espace invisible qui les porte au-dessus du champ de paille hérissé. Une pendule solitaire plantée dans la terre. Deux drapeaux rouges penchés, délavés comme des pétales de coquelicot. Un silo rouillé de toute beauté. Des maisons de pierre. Pierre ? Au toit noir. Des poteaux, des poteaux, des poteaux (je pense à ce roman écossais). Les fils électriques chargés de mouettes qui s’éparpillent à notre passage, puis reviennent. La terre des champs gorgée de lait, reflets du ciel blanc dans les flaques. Beaucoup de maisons maintenant. Des moutons, des vaches, des poules, des vaches, où sont les gens ? et un long tas de fumier comme la dépouille d’un Chewbacca mouillé…
lundi 29 novembre 2010
Young Europe à Strasbourg
La vibration des langues
Entre soleil et pluie battante, je viens de vivre un extraordinaire moment de théâtre en euskara (la langue basque) à St Jean de Luz.
Tout a commencé samedi après-midi, avec la finale régionale du championnat des bertsularis pour laquelle le Théâtre du Rivage, connaissant mon appétit des langues, m’avait offert une place. Pendant plus de deux heures, au milieu de trois mille personnes de tous âges, j’ai plongé dans ce monde d’improvisation poétique rimée et chantée sur des thèmes les plus variés, dans une vraie ferveur rock, et la théâtralité de cet art m’a frappée : l’entrée des huit jeunes concurrents sous les vivats ; leurs voix successives, comme des flèches sonores dans l’espace de l’immense salle, vibrantes et claires ; l’émotion provoquée par le duo mots/musique ; et la force émouvante du chœur de la foule —trois mille voix— qui les reprend, parfois même les devine et les accompagne. Quelle intensité dans ces secondes d’attente en silence, pendant qu’un duo de bertsularis, tête baissée, balançant d’un pied sur l’autre, laisse l’inspiration lui monter, face à nous tous, muets. Quelle force soudain lancée quand la voix du premier jaillit planté derrière le micro, mains enfoncées dans les poches, pieds enracinés dans la scène, puis quand le second répond et relance. Et quelle magnifique écoute du public, suspendu à leurs lèvres, quelle attention aigüe, quel dialogue sensible d’une immense théâtralité !
Parce que je ne parle pas euskara, j’ai écouté autrement : avec toutes mes oreilles, mes yeux, mes antennes. Et cela m’a permis de découvrir la force de ce moment rare, et de partager, à ma façon, cet échange spectaculaire entre les bertsularis et nous, leur public, au cœur de la langue, de sa subtilité et de sa création improvisée.
Le lendemain, c’est le même effet qui s’est produit, encore décuplé, lors de la lecture-spectacle d’Eskimal Kabiliarra (ma pièce “L’eskimo kabyle”, traduite en euskara par Hartzea Lopez, avec le soutien de l’Institut Basque), mise en scène par Pascale Daniel-Lacombe, au Théâtre du Rivage, avec Iniazio Tolosa et Beñat Achiary. Cette pièce n’a jamais été créée en français, c’était donc un grand moment pour moi : tant que mes pièces n’ont pas été jouées, elles ne sont pas vraiment nées.
Ne parlant toujours pas euskara, j’ai assisté à ce moment de théâtre de tous mes yeux, de toutes mes oreilles, de toutes mes antennes déployées et je l’ai ressenti au-delà des mots et du rationnel, je l’ai éprouvé, il m’a traversée de part en part, m’a remplie de la tête aux pieds, m’a transportée. Grâce à cette attention décalée par la langue, j’ai ressenti plus encore l’excellence des interprètes, leur justesse profonde, l’intelligence et leur direction et le monde de fiction théâtrale dans lequel j’ai reconnu, seconde après seconde, l’entièreté de ma pièce, tout ce que j’avais voulu y mettre, en l’écrivant, et qui dépasse l’écriture : la solitude, le dénuement, la douleur, la pluie ruisselante dehors comme dedans, le jeu fantomatique des ombres, la rage des mots griffant le mur de kraft, l’espace qui bascule soudain, la chair des sons et des chants, la puissance poétique salvatrice, la langue habitée par l’homme comme l’homme par sa langue et son âme chantante, animale, vivante, dernière fidèle à l’accompagner.
Ecrire du théâtre, pour moi, c’est écrire des provocations poétiques, ouvrir des portes sur des mondes inventés qui parlent mieux de la réalité, charger la langue d’émotions rayonnantes, de sons évocateurs et de non-dits profonds. Voilà pourquoi toutes les langues me passionnent dans leur essence et pourquoi je saisis chaque occasion, quand je travaille ailleurs, d’apprivoiser leur chair et d’interroger leur singularité.
Alors hier, quand, remplaçant la richesse de l’euskara et ses échos inuktikuts, le vent des pôles, né d’un cintre métallique tournoyant, a empli l’immense hangar du Rivage, j’ai été submergée par l’émotion de cette rencontre artistique rare.
Grâce à ces deux jours, plus que jamais, je crois dans le frottement des langues sur nos scènes de théâtre d’aujourd’hui. Je crois dans leur immense force dramaturgique, leur vibration rayonnante et la relation nouvelle, sensorielle, intime et intuitive, que leur rencontre tisse avec le public. Ce spectacle en est la preuve vivante. Je lui souhaite une belle, riche et longue vie de voyage à la rencontre de tous les publics des pays basques nord et sud et d’ailleurs, surtitré, et j’attends avec appétit ma prochaine rencontre théâtrale avec l’euskara.
Tout a commencé samedi après-midi, avec la finale régionale du championnat des bertsularis pour laquelle le Théâtre du Rivage, connaissant mon appétit des langues, m’avait offert une place. Pendant plus de deux heures, au milieu de trois mille personnes de tous âges, j’ai plongé dans ce monde d’improvisation poétique rimée et chantée sur des thèmes les plus variés, dans une vraie ferveur rock, et la théâtralité de cet art m’a frappée : l’entrée des huit jeunes concurrents sous les vivats ; leurs voix successives, comme des flèches sonores dans l’espace de l’immense salle, vibrantes et claires ; l’émotion provoquée par le duo mots/musique ; et la force émouvante du chœur de la foule —trois mille voix— qui les reprend, parfois même les devine et les accompagne. Quelle intensité dans ces secondes d’attente en silence, pendant qu’un duo de bertsularis, tête baissée, balançant d’un pied sur l’autre, laisse l’inspiration lui monter, face à nous tous, muets. Quelle force soudain lancée quand la voix du premier jaillit planté derrière le micro, mains enfoncées dans les poches, pieds enracinés dans la scène, puis quand le second répond et relance. Et quelle magnifique écoute du public, suspendu à leurs lèvres, quelle attention aigüe, quel dialogue sensible d’une immense théâtralité !
Parce que je ne parle pas euskara, j’ai écouté autrement : avec toutes mes oreilles, mes yeux, mes antennes. Et cela m’a permis de découvrir la force de ce moment rare, et de partager, à ma façon, cet échange spectaculaire entre les bertsularis et nous, leur public, au cœur de la langue, de sa subtilité et de sa création improvisée.
Le lendemain, c’est le même effet qui s’est produit, encore décuplé, lors de la lecture-spectacle d’Eskimal Kabiliarra (ma pièce “L’eskimo kabyle”, traduite en euskara par Hartzea Lopez, avec le soutien de l’Institut Basque), mise en scène par Pascale Daniel-Lacombe, au Théâtre du Rivage, avec Iniazio Tolosa et Beñat Achiary. Cette pièce n’a jamais été créée en français, c’était donc un grand moment pour moi : tant que mes pièces n’ont pas été jouées, elles ne sont pas vraiment nées.
Ne parlant toujours pas euskara, j’ai assisté à ce moment de théâtre de tous mes yeux, de toutes mes oreilles, de toutes mes antennes déployées et je l’ai ressenti au-delà des mots et du rationnel, je l’ai éprouvé, il m’a traversée de part en part, m’a remplie de la tête aux pieds, m’a transportée. Grâce à cette attention décalée par la langue, j’ai ressenti plus encore l’excellence des interprètes, leur justesse profonde, l’intelligence et leur direction et le monde de fiction théâtrale dans lequel j’ai reconnu, seconde après seconde, l’entièreté de ma pièce, tout ce que j’avais voulu y mettre, en l’écrivant, et qui dépasse l’écriture : la solitude, le dénuement, la douleur, la pluie ruisselante dehors comme dedans, le jeu fantomatique des ombres, la rage des mots griffant le mur de kraft, l’espace qui bascule soudain, la chair des sons et des chants, la puissance poétique salvatrice, la langue habitée par l’homme comme l’homme par sa langue et son âme chantante, animale, vivante, dernière fidèle à l’accompagner.
Ecrire du théâtre, pour moi, c’est écrire des provocations poétiques, ouvrir des portes sur des mondes inventés qui parlent mieux de la réalité, charger la langue d’émotions rayonnantes, de sons évocateurs et de non-dits profonds. Voilà pourquoi toutes les langues me passionnent dans leur essence et pourquoi je saisis chaque occasion, quand je travaille ailleurs, d’apprivoiser leur chair et d’interroger leur singularité.
Alors hier, quand, remplaçant la richesse de l’euskara et ses échos inuktikuts, le vent des pôles, né d’un cintre métallique tournoyant, a empli l’immense hangar du Rivage, j’ai été submergée par l’émotion de cette rencontre artistique rare.
Grâce à ces deux jours, plus que jamais, je crois dans le frottement des langues sur nos scènes de théâtre d’aujourd’hui. Je crois dans leur immense force dramaturgique, leur vibration rayonnante et la relation nouvelle, sensorielle, intime et intuitive, que leur rencontre tisse avec le public. Ce spectacle en est la preuve vivante. Je lui souhaite une belle, riche et longue vie de voyage à la rencontre de tous les publics des pays basques nord et sud et d’ailleurs, surtitré, et j’attends avec appétit ma prochaine rencontre théâtrale avec l’euskara.
TAG au Naxos Bobine
En belles compagnies…
(retour sur 3 jours à Londres, à l’invitation de Company of Angels, pour Theatre Cafe, festival centré sur les écritures théâtrales contemporaines pour la jeunesse)
La richesse de ces trois jours d’octobre 2010 à Londres n’a eu d’égale que leur profondeur. Pourquoi ? Sans doute parce que la qualité appelle la qualité. En faisant le pari d’un travail exigeant et fin dans toutes les étapes de sa préparation, les organisateurs ont préparé le terrain de la réussite et de l’originalité de leur festival européen.
Il faut placer les comédiens au cœur de ces trois jours et de mon enthousiasme. Leur engagement dans toutes les lectures ou spectacles a été formidable d’énergie et de subtilité. Quel plaisir de les retrouver trois ou quatre fois par jour dans des registres et rôles si différents, d’une pièce à l’autre, chaque fois maîtres d’une vraie présence physique qui sait préserver l’ouverture de la lecture ! Cette qualité de travail théâtral a fait écho à la finesse et la justesse dramaturgiques mises en œuvre pour présenter ces pièces pour la jeunesse de différents pays, pour les offrir au public professionnel venu de toute l’Europe, pour les lui ouvrir, dans toute la richesse de leur altérité.
Touché par ces qualités de direction et d’interprétation, l’auteur ou l’autrice de la pièce mise en lecture a ensuite répondu aux questions avec autant de sincérité que de générosité, et la discussion publique engagée avec son traducteur ou son metteur en scène et Chris Campbell, dramaturge au Royal Court, a chaque fois ouvert des champs de réflexion d’une vraie profondeur. Profondeur appelant, à son tour, les plus belles réflexions/questions de la part du public, conscient lui aussi de vivre un moment rare. Et cet esprit de curiosité chaleureuse et d’intelligence dans tous les sens du terme s’est prolongé sans fin lors de chaque pause.
Tout cela vient d’un vrai pari artistique : celui de la qualité et de l’engagement. Qualité du travail scénique et aussi des pièces choisies puis traduites en anglais, vivants témoins de la richesse dramaturgique contemporaine, car réellement différentes les unes des autres, écrites par des auteurs différentset travaillant dans des contextes culturels différents. L’altérité a ici été à la fois un moteur Et un lieu de rencontre artistique. Car rencontre réelle il y avait, et échos et ricochets entre ces pièces intimement liées par des questionnements essentiels qui débordent le cadre du théâtre pour la jeunesse : la mort, la violence et la brutalité/leur représentation, le rapport homme/animal, les mondes mentaux comme arme de survie, le sens caché des mots…
Et c’est dans ce vivier du théâtre d’aujourd’hui pour la jeunesse, qui avance partout en Europe, que les 8 épisodes d’“Ank ! Ang !”, le feuilleton théâtral multilingue et multiplumes de LABOO7 , ont été lus en bouquet final, en anglais, par une dizaine de jeunes comédiens virevoltants, couverts de plumes, maquillés de craie, via un montage inventif, plein d’images fortes et de sensations d’espace, et devant une salle comble qui lui a réservé un accueil enthousiaste. 6 des 9 auteurs avaient fait le déplacement jusqu’à Londres, depuis 5 pays différents, et la discussion qui a suivi cette lecture nous a confirmés que notre intuition dans ce travail collectif multilingue toujours en cours, associant étroitement les traducteurs à l’écriture migratoire, avait tout son sens, dans son fond comme dans sa forme.
Avec toute l’équipe de Company of Angels et leur festival Theatre Cafe, j’ai découvert un nouvel espace européen de réflexion théâtrale et d’échanges artistiques, aussi intelligent qu’ouvert et rare, centré sur le jeune public. J’espère que ses moyens iront croissant pour préserver l’indispensable qualité de travail qui le fonde et lui permettra, je l’espère, de rayonner longtemps, sans limite d’âge ni frontière.
La richesse de ces trois jours d’octobre 2010 à Londres n’a eu d’égale que leur profondeur. Pourquoi ? Sans doute parce que la qualité appelle la qualité. En faisant le pari d’un travail exigeant et fin dans toutes les étapes de sa préparation, les organisateurs ont préparé le terrain de la réussite et de l’originalité de leur festival européen.
Il faut placer les comédiens au cœur de ces trois jours et de mon enthousiasme. Leur engagement dans toutes les lectures ou spectacles a été formidable d’énergie et de subtilité. Quel plaisir de les retrouver trois ou quatre fois par jour dans des registres et rôles si différents, d’une pièce à l’autre, chaque fois maîtres d’une vraie présence physique qui sait préserver l’ouverture de la lecture ! Cette qualité de travail théâtral a fait écho à la finesse et la justesse dramaturgiques mises en œuvre pour présenter ces pièces pour la jeunesse de différents pays, pour les offrir au public professionnel venu de toute l’Europe, pour les lui ouvrir, dans toute la richesse de leur altérité.
Touché par ces qualités de direction et d’interprétation, l’auteur ou l’autrice de la pièce mise en lecture a ensuite répondu aux questions avec autant de sincérité que de générosité, et la discussion publique engagée avec son traducteur ou son metteur en scène et Chris Campbell, dramaturge au Royal Court, a chaque fois ouvert des champs de réflexion d’une vraie profondeur. Profondeur appelant, à son tour, les plus belles réflexions/questions de la part du public, conscient lui aussi de vivre un moment rare. Et cet esprit de curiosité chaleureuse et d’intelligence dans tous les sens du terme s’est prolongé sans fin lors de chaque pause.
Tout cela vient d’un vrai pari artistique : celui de la qualité et de l’engagement. Qualité du travail scénique et aussi des pièces choisies puis traduites en anglais, vivants témoins de la richesse dramaturgique contemporaine, car réellement différentes les unes des autres, écrites par des auteurs différentset travaillant dans des contextes culturels différents. L’altérité a ici été à la fois un moteur Et un lieu de rencontre artistique. Car rencontre réelle il y avait, et échos et ricochets entre ces pièces intimement liées par des questionnements essentiels qui débordent le cadre du théâtre pour la jeunesse : la mort, la violence et la brutalité/leur représentation, le rapport homme/animal, les mondes mentaux comme arme de survie, le sens caché des mots…
Et c’est dans ce vivier du théâtre d’aujourd’hui pour la jeunesse, qui avance partout en Europe, que les 8 épisodes d’“Ank ! Ang !”, le feuilleton théâtral multilingue et multiplumes de LABOO7 , ont été lus en bouquet final, en anglais, par une dizaine de jeunes comédiens virevoltants, couverts de plumes, maquillés de craie, via un montage inventif, plein d’images fortes et de sensations d’espace, et devant une salle comble qui lui a réservé un accueil enthousiaste. 6 des 9 auteurs avaient fait le déplacement jusqu’à Londres, depuis 5 pays différents, et la discussion qui a suivi cette lecture nous a confirmés que notre intuition dans ce travail collectif multilingue toujours en cours, associant étroitement les traducteurs à l’écriture migratoire, avait tout son sens, dans son fond comme dans sa forme.
Avec toute l’équipe de Company of Angels et leur festival Theatre Cafe, j’ai découvert un nouvel espace européen de réflexion théâtrale et d’échanges artistiques, aussi intelligent qu’ouvert et rare, centré sur le jeune public. J’espère que ses moyens iront croissant pour préserver l’indispensable qualité de travail qui le fonde et lui permettra, je l’espère, de rayonner longtemps, sans limite d’âge ni frontière.
mercredi 3 novembre 2010
Champagne ! dans le Piccolo électronique
“Karin Serres en résidence d’écriture
Son projet est fondé sur la collecte de mémoire auprès de la population.
L’auteur de nombreuses pièces de théâtre pour le jeune public vient de débuter à Reims, à l’invitation de Méli’môme, une résidence d’écriture déployée sur toute la saison 2010-2011 puisqu’elle s’achèvera en juin. «Le dépaysement est l’un de mes moteurs d’écriture préférés, comme l’infime extraordinaire de nos vies est le cœur de ce que j’écris,explique Karin Serres. Partager un espace-temps réel et précis avec le public, permet de goûter ensemble au plaisir de l’écriture en direct, de l’écriture vivante, de la fiction toujours renouvelée comme autant de façons de traverser le quotidien, de tenter de le comprendre et de l’apprivoiser». Le thème retenu pour cette résidence est celui des moments et des événements à fêter. «Pendant neuf mois, elle va écrire des histoires inventées, des chansons, du théâtre peut-être, explique Joël Simon, le directeur de Méli’môme. En bref : de la fiction, autour d’événements en tous genres à fêter. Mais de quoi se nourrit la fiction ? De bribes de vie quotidienne. Voilà pourquoi, quels que soient votre âge ou votre métier, elle vous invite à ce grand collectage qui l’inspirera pour écrire “Champagne !“, une fiction multiforme qu’elle partagera avec vous tous fin juin 2011». Sur ce projet, Méli’môme invite la population de Reims et des alentours à lui raconter un «événement» décrit en quelques mots sur une feuille, ou par une photo, un dessin, un objet, un article découpé et annoté... C.P.”
C'est dans Le Piccolo-lettre électronique de Novembre, numéro 2 !
Il y a aussi, en dernière page, un super article sur LABOO7, à l'occasion de la lecture d'Ank ! Ang !, 1 à 8, en anglais, pendant le festival Theatre Cafe, cette fin de semaine ; un beau portrait de Pascale Daniel-Lacombe en p6 ; et plein d'articles très intéressants…
Son projet est fondé sur la collecte de mémoire auprès de la population.
L’auteur de nombreuses pièces de théâtre pour le jeune public vient de débuter à Reims, à l’invitation de Méli’môme, une résidence d’écriture déployée sur toute la saison 2010-2011 puisqu’elle s’achèvera en juin. «Le dépaysement est l’un de mes moteurs d’écriture préférés, comme l’infime extraordinaire de nos vies est le cœur de ce que j’écris,explique Karin Serres. Partager un espace-temps réel et précis avec le public, permet de goûter ensemble au plaisir de l’écriture en direct, de l’écriture vivante, de la fiction toujours renouvelée comme autant de façons de traverser le quotidien, de tenter de le comprendre et de l’apprivoiser». Le thème retenu pour cette résidence est celui des moments et des événements à fêter. «Pendant neuf mois, elle va écrire des histoires inventées, des chansons, du théâtre peut-être, explique Joël Simon, le directeur de Méli’môme. En bref : de la fiction, autour d’événements en tous genres à fêter. Mais de quoi se nourrit la fiction ? De bribes de vie quotidienne. Voilà pourquoi, quels que soient votre âge ou votre métier, elle vous invite à ce grand collectage qui l’inspirera pour écrire “Champagne !“, une fiction multiforme qu’elle partagera avec vous tous fin juin 2011». Sur ce projet, Méli’môme invite la population de Reims et des alentours à lui raconter un «événement» décrit en quelques mots sur une feuille, ou par une photo, un dessin, un objet, un article découpé et annoté... C.P.”
C'est dans Le Piccolo-lettre électronique de Novembre, numéro 2 !
Il y a aussi, en dernière page, un super article sur LABOO7, à l'occasion de la lecture d'Ank ! Ang !, 1 à 8, en anglais, pendant le festival Theatre Cafe, cette fin de semaine ; un beau portrait de Pascale Daniel-Lacombe en p6 ; et plein d'articles très intéressants…
mardi 26 octobre 2010
Eskimal Kabiliarra !
“Aitua, ez dut araiz etsipena nire erreinura indarrez sartzen utziko !
Sacré nom d'un chien de fusil, je ne vais tout de même pas laisser le désespoir envahir mon royaume ?”
Traduit en basque par Hartzea Lopez, avec le soutien de l'institut Culturel Basque, l'Eskimo Kabyle-Eskimal Kabiliarra vient d'être créé par Pascale Daniel-Lacombe sous une première forme lecture-spectacle, avec Iniazio Tolosa et Benat Achiary, qui tourne tous les vendredis dans le pays basque, dans le cadre du festival "Soit dit en passant" du Théâtre du Rivage :
Le 8 octobre à 20h30, à Biriatou
Le 15 octobre, à Ciboure
Le 22 octobre, à Ahetze
Le 29 octobre, à Urrugne
Le 5 novembre, à Sare
Le 13 ou 14 novembre, à St Jean de Luz
Le 26 novembre, à Hendaye
Le 3 décembre, à Ainhoa
Le 10 décembre, à Ascain.
Crédit photos © Marie Iris Chevallier
Pour plus de renseignements : www.theatredurivage.com
lundi 25 octobre 2010
Ank ! Ang ! in english
Samedi 6 novembre,
à 16h,
première lecture publique
de la version anglaise d'“Ank ! Ang !
(je suis un Oi sauvage)”,
le feuilleton théâtral multilingue et multiplumes
de Laboo7,
épisodes 1 à 8.
Unicorn Theatre
147 Tooley Street
London SE1 2HZ
HOW TO GET THERE
Tube: London Bridge (Northern Line, Bank branch) or Tower Hill (District Line)
Rail: London Bridge
Bus: RV1, 15, 17, 21, 35, 40, 42, 47, 43, 48, 78, 133, 141, 149, 343, 381, 521,705
ANK! ANG!
An international theatre serial commissioned by LABO07 (France)
directed by Mia Theil Have
with the Theatre Café Festival ensemble and
actors from Southwark Playhouse Young Company
led by Paul Edwards
Ank! Ang! is a unique collaborative playwriting project about children, teenagers and
adults from all across Europe, who discover their ability to grow wings and take off.
Developed by Karin Serres, co-founder of LABO07 in Paris, Ank! Ang! tells the story of the
The Wild Gees, human migrants who traverse the skies of Europe in multi-lingual flights.
Ank! Ang! is both their cry and the title of the serial play which tells their stories.
Each episode is written by a different author.
Leaving France, with an episode by Karin Serres, Ank! Ang! has so far swept across the skies of Germany, Sweden, Italy, and Portugal with episodes by Dirk Laucke, Eric Uddenberg, Frederica Iacobelli, Sylvain Levey and José Caldas. On the way, Ank! Ang! has been seen by audiences across those countries at the Teaterbiennalen (Sweden), Villa San Michele (Italy) and Théâtre de l'Est parisien, the Institut Suédois, and the Théâtre de la Tête Noire, and Théâtre Massalia (France).
Especially commissioned for Theatre Café Festival, we have two brand new episodes written by Company of Angels’ John Retallack and festival author Beth Escudé i Gallès, putting the UK and Spain on the Ank! Ang! map.
Theatre Café Festival is delighted to present the English-language premiere of Ank! Ang!, directed by Company of Angels Associate Mia Theil Have with a mixed cast of professional actors from the Theatre Café ensemble and members of the Southwark Playhouse Young Company.
Crédit photo © Jasper, l'Oi photographe
www.companyofangels.co.uk
Louise/les ours au Lavoir Moderne parisien
Woaoh ! Béatrice et toute son équipe (car c'est un vrai travail de troupe) ont déjà trouvé une palette extrêmement riche et sensible pour raconter Louise/les ours. Je vais revenir les voir. Certains passages m'habitent encore, comme la construction petit à petit de l'ours invisible puis son éclatement à 3 manipulateurs, et son infinie puissance silencieuse dans sa sortie démultipliée dans l'espace, que les mots ne peuvent décrire…
Chasse au titre
Après une bonne séance de travail avec Sophie Ottinger, de la Compagnie En verre et Contre Tout, en résidence au Centre Culturel Pablo Picasso d'Homécourt, voici tous les titres que notre pièce ne portera pas :
- version Harlequin : L'eau de mes larmes
- version V. Woolf : Une heure à soi
- version Diams : Dans ma bulle
- version russe : La cabane des matriochkas
- version futuriste : Inside me
- version A. Artaud : Moi et mes doubles
- version soap : Pelure d'oignon
- version A. Philippe : Le temps d'un soupir
- version gastronomique : L'effet BN
- version psycho-pédagogique : L'inverse des voyages en voiture
- version physique quantique : L'opposée du plastique fou du temps
- version jeu de mots : Intempétries/Un temps pétri…
- version philo ou Joostein Garder : Le Monde de Mira
… à suivre, donc…
http://www.enverreetcontretout.net
- version Harlequin : L'eau de mes larmes
- version V. Woolf : Une heure à soi
- version Diams : Dans ma bulle
- version russe : La cabane des matriochkas
- version futuriste : Inside me
- version A. Artaud : Moi et mes doubles
- version soap : Pelure d'oignon
- version A. Philippe : Le temps d'un soupir
- version gastronomique : L'effet BN
- version psycho-pédagogique : L'inverse des voyages en voiture
- version physique quantique : L'opposée du plastique fou du temps
- version jeu de mots : Intempétries/Un temps pétri…
- version philo ou Joostein Garder : Le Monde de Mira
… à suivre, donc…
http://www.enverreetcontretout.net
M'auteurs à Reims
M’auteurs et chocolat
Comme beaucoup de gens (de tous les âges), j’aime le gâteau au chocolat. Celui de ma mère, celui de ma grand-mère, celui à la cannelle, et le vingt-deux minutes, et le fondant indémoulable… Chacun, chaque famille a sa recette préférée, transmise par les générations précédentes ou trouvée ailleurs, qui devient SON gâteau au chocolat, celui que l’on fait dès que l’on a envie de bonheur, de réconfort ou de faire plaisir à ceux que l’on reçoit. La preuve ? Ce week-end, dans le goûter offert par les familles hôtes des lectures théâtrales et leurs invités, au milieu des tartes, des samoussas, du sucré, du salé, chaque fois : un gâteau au chocolat. Chaque fois différent, chaque fois délicieux, partagé et dégusté avec gourmandise jusqu’à la dernière miette.
Dimanche après-midi, après ma dernière lecture dans une tour près du chantier du tramway, le ciel sous les yeux, les voix des enfants dans les oreilles et une part de moelleux au chocolat blanc dans la main (excellent !) j’ai soudain pensé que pour Nova Villa, peut-être, la lecture de théâtre en public ou chez l’habitant, c’est comme le gâteau au chocolat : beaucoup de gens aiment ça, chaque lecture est différente, chacun a son texte préféré et sa façon de le lire à voix haute, pour un public tout proche, de tous les âges. Et ces lectures répondent à la même envie : bonheur, réconfort, et plaisir partagé.
Cela me touche beaucoup d’avoir eu la chance, par deux fois, d’y être associée. Et j’espère revenir l’an prochain : merci Nova Villa, et vive ce M’auteurs au chocolat !
(photo © J. Simon)
www.nova-villa.com
http://www.lunion.presse.fr/article/autres-actus/au-college-trois-fontaines-des-lectures-spectacles-offertes-aux-eleves
Marzïa au TMA, suite
Le jeune public, avenir des politiques de démocratisation culturelles ?
Journées de la Scène/l'Orcca/Nova Villa
(Première table ronde)
En tant qu’autrice de théâtre, la démocratisation de la culture est une de mes questions de fond : pour qui j’écris du théâtre, aujourd’hui ? Cette question du rapport avec le public est une urgence à laquelle notre théâtre contemporain doit vraiment réfléchir. Heureusement, en regard de cette question, certaines spécificités du théâtre pour le jeune public me rendent optimiste :
- c’est un public qui n’a pas le même âge que les équipes artistiques et les programmateurs, donc un public différent, auquel on s’intéresse par nature
- c’est un public dont l’âge change chaque année, rien n’est donc jamais gagné, il faut sans cesse recommencer avec de nouveaux enfants
- et c’est un public qui fait ses premières rencontres avec le théâtre, ce qui met à la fois la barre très haut pour nous (ne pas les décevoir) et nous offre une grande liberté (ils ont peu de préjugés).
Pour toutes ces raisons, le jeune public me paraît être un espace idéal par son ouverture, vers une plus grande démocratisation de la culture. Dans ce “jeune public” global, il faut distinguer plusieurs publics très différents : les bébés, les enfants et les adolescents, sans oublier les adultes accompagnants (famille, médiateurs, enseignants…) pour lesquels, souvent, c’est aussi un début dans l’expérience de spectateur.
Comment travailler avec ce “jeune public” différent, et dans cette optique de démocratisation, justement ?
Loin du clivage l’art pour l’art/l’instrumentalisation de l’art, qui tient beaucoup à notre regard français sur ce mot “art”, je défends une création théâtrale vivante qui replace le public au cœur de son processus de travail : à la fois source, énergie et vocation de nos pièces et spectacles. C’est parce que je travaille avec et pour ces personnes d’âge, de culture et de ressentis différents des miens que je peux élargir mon champ artistique, en écho au leur : ils m’emmènent ailleurs, autrement.
Pour ce faire, pour profiter entièrement de ce champ si riche qui nous est offert, aujourd’hui, il est temps d’élargir notre cadre de travail : sortir du seul objet pièce/texte à jouer/spectacle pour travailler l’écriture et le théâtre sur des temps plus variés, allant du presque instantané à l’accompagnement sur le long terme du quotidien des théâtres et de leur public, afin de partager (sans avoir à l’expliquer) l’interaction entre la vie quotidienne d’un territoire et la fiction théâtrale qui peut s’y créer. C’est une question d’espace-temps de travail à ouvrir, à modifier, à réfléchir plus librement, en toute justesse et originalité, projet par projet.
Les auteurs doivent revenir habiter les lieux théâtraux au quotidien ou régulièrement, afin que le vivant de leurs écritures redevienne une force et une source de la vie théâtrale et de la relation avec les publics. C’est le travail que j’ai entrepris par exemple avec Nova Villa, autour du projet “Champagne” cette saison, avec le Centre Culturel Pablo Picasso d’Homécourt et la compagnie En Verre et Contre tout, ou encore avec le Théâtre du Rivage, sur plusieurs années.
Lorsque ces projets expérimentaux sont bien pensés, chaque participant à sa place, faisant son métier, cette nouvelle relation entre l’écriture vivante, les lieux de théâtre et leurs publics génère de nombreux apports artistiques pour le théâtre jeune public (et le théâtre contemporain en général). De nouvelles méthodes de travail peuvent alors se développer, privilégiant une interactivité créatrice avec le public, notamment les adolescents, auxquels il faut aujourd’hui trouver de nouvelles places de spectateurs-acteurs, plus impliqués dans les étapes des créations qui leur sont destinées. De nouvelles formes théâtrales peuvent se déployer, en écho à ces cultures et sensibilités particulières des bébés, des enfants ou des adolescents (feuilletons, transdisciplinarité avec la musique, la danse…etc.). Une meilleure interaction entre le milieu scolaire et le milieu théâtral se déploie, basée sur la complémentarité de nos fréquentations de la langue, du corps, de la fiction. Dans un geste tant artistique que politique, ce public jeune (bébés, enfants) permet aussi d’associer les accompagnants (familles, médiateurs) aux jeunes spectateurs, invitant toute une population non familière avec le monde du théâtre. Ces nouvelles relations artistiques avec de jeunes/nouveaux spectateurs aux préjugés encore minimes nous permettent aussi d’ouvrir grand notre théâtre sur le monde, sur la diversité des langues, des dramaturgies, des façons de jouer, de représenter…
Alors, quels souhaits pour le théâtre jeune public de demain ?
Prolonger son chemin inventif lancé depuis des années en privilégiant l ‘intelligence sensible, la sensorialité, le dialogue de part et d’autre de la scène, et durant tout le processus de création.
Former les professionnels comme les publics, les médiateurs comme les tutelles à la richesse de cet espace de création théâtrale : pour apprécier un nouveau goût, il faut apprendre à y goûter.
Bénéficier d’une vraie économie à la hauteur de nos ambitions, qui nous donnera à tous le temps de travailler en profondeur dans cette relation professionnels de spectacles/ public, le cœur de notre travail artistique, pour voir toutes les nouvelles formes, histoires et interactions qui palpitent aujourd’hui, se déployer.
Repenser l’espace-temps de notre travail. Défendre le long terme, résister à la quantification, à l’événementialisme, à l’instrumentalisation comme au repli narcissique en leur préférant les émotions partagées régulièrement et la liberté de création en vrai dialogue avec le public.
Enfin, continuer de résister ensemble pour que cet espace-temps de travail et de rencontres humaines continue à ne servir à RIEN de fléché : c’est grâce au plaisir personnel et unique ressenti par chacun des participants de ce dialogue autour de la scène que tant de gains collatéraux peuvent en découler et se multiplier, devenir étincelles à leur tour et rallumer le feu d’un vrai théâtre inventif, convivial, ouvert à tous, profondément humain et réellement contemporain.
vendredi 15 octobre 2010
lundi 11 octobre 2010
“Louise/les ours” par La Scène Infernale
"Champagne !"
"Champagne !", c'est parti, depuis M'auteurs, ce week-end de lectures si chaleureux et original organisé par Nova Villa, qui vient de se dérouler à Reims et aux alentours.
Evénement public ou privé, exploit intime ou interplanétaire, découverte, succès, moment fort, première fois : on a tous un jour quelque chose à fêter.C’est sur ces moments spéciaux, pleins de joie, que j'ai choisi de travailler de septembre 2010 à juin 2011 avec Nova Villa. Pendant ces neuf mois, je vais écrire des histoires inventées, des chansons, du théâtre peut-être, bref : de la fiction, autour d’événements en tous genres à fêter.
Mais de quoi se nourrit la fiction ? De bribes de vie quotidienne. Voilà pourquoi, quels que soient leur âge ou leur métier, j'invite tous les habitants et habitantes de Champagne à participer via Nova Villa à un grand collectage qui m’inspirera pour écrire “Champagne !”, une fiction multiforme que je lirai en public fin juin 2011..
Ce qui compte, c’est l’événement que chacune et chacun juge le plus important, dans sa vie, hier ou aujourd’hui : le premier cartable ou la première paire de chaussures à talons, un mariage, une nuit sans cauchemars, la première paie, un traité de paix, le premier pas sur la Lune, les jours qui rallongent, une déclaration d’amour, une inauguration, couper ses cheveux, la première neige, un morceau joué sans fausse note, une belle idée… etc.
Comment participer ? Rendez-vous sur le site de Nova Villa : www.nova-villa.com.
“Le dépaysement est l’un de mes moteurs d’écriture préférés, comme l’infime extraordinaire de nos vies est le cœur de ce que j’écris. Partager un espace-temps réel et précis avec le public permet de goûter ensemble au plaisir de l’écriture en direct, de l’écriture vivante, de la fiction toujours renouvelée comme autant de façons de traverser le quotidien, de tenter de le comprendre et de l’apprivoiser.” Karin Serres / Juin 2010
vendredi 1 octobre 2010
mardi 21 septembre 2010
“Rose, Rose, Rose” ?
lundi 20 septembre 2010
I Sable au MPIF : woaoh !
Cette lecture d'I Sable, samedi soir, au musée, dans la salle 2bis où je travaillais, quand je venais, m'a bouleversée. J'ai été tellement prise par le vivant de cette histoire, juste lue avec trois bouts de ficelle, mais clairement mise en scène, avec trois comédiens formidables d'écoute, de justesse, d'engagement et de générosité, que j'en ai oublié comment la pièce se terminait et quand, en plein milieu, Mélancolie dit : ça aurait pu se terminer comme ça… je me suis brutalement rappelé la fin vers laquelle la force de cette fiction au long cours m'avait entraînée, et ma responsabilité d'autrice qui a tué I Sable sous son stylo m'a saisie à la gorge.
Pourtant, j'avais lutté, pendant l'écriture, quand j'avais vu la noirceur arriver, pour qu'elle ne meure pas, mais rien à faire.
Nous avons tant ri pendant la lecture du printemps, samedi soir, avec la lumière du soleil qui baissait dans la vraie forêt derrière la vitre, et l'amour naissant entre Pierre et Mélancolie, et le décalage désolé de Mika, chaque fois plein de fougue mal appliquée, que la violence de l'été et la fin d'I Sable nous ont sciés. L'émotion du public, ce soir-là, tout comme la mienne, étaient palpables et partagées, au point que nous allons donner de nouvelles lectures avant l'été, qu'on a demandé des nouvelles de l'édition, et le public était composé de gens de tous âges.
Pour finir, ce que dont j'ai parlé, les bras encore émus, la voix nouée, c'est du plaisir de raconter des histoires et de partager ces racontars, après. C'est pour ça que j'écris, j'ai dit. Merci à toutes celles et à tous ceux qui étaient là, et toutes celles et à tous ceux qui ont soutenu ce projet depuis ses premiers mots écrits.
Lecture mise en scène par Anne Contensou, compagnie Bouche bée, dans le cadre des lectures A Voix Vives de la Médiathèque de Seine et Marne et de la Journée du Patrimoins, au MPIF (Nemours).
Avec Grétel Delattre, Jean-Baptiste Anoumon et Pascal Sangla.
mardi 14 septembre 2010
vendredi 10 septembre 2010
Eskimal kabiliarra / L'eskimo kabyle
Pascale Daniel-Lacombe (Théâtre du Rivage) va créer l'Eskimo Kabyle à St Jean de Luz,en langue basque (traduction Hartzea Lopez).
Pour le plaisir, un petit aperçu :
“Aitua, ez dut araiz etsipena nire erreinura indarrez sartzen utziko !”
(Sacré nom d'un chien de fusil, je ne vais tout de même pas laisser le désespoir envahir mon royaume !)
et
“Eta orain, zer ordu pil pil ? Pilarik ez ? Pilak hil ? urtuak ? Erdi erdoiluak, hondartuak ? Ala ibai hormatu batean bainatu al naiz ? Nere ordulariak azken hatsa bota du. Arima han gora joan zaio. Bostak ? Tearen tenorea.”
(Quelle heure est-il ? Plus de pile ? Pile brûlée ? Liquéfiée ? Rouages rouillés, ensablés ? Ou bien me serais-je baigné dans une rivière glacée ? Ma montre a poussé son dernier soupir. Son âme est partie en fumée. Cinq heures , c'est l'heure du thé.)
La suite bientôt !
Pour le plaisir, un petit aperçu :
“Aitua, ez dut araiz etsipena nire erreinura indarrez sartzen utziko !”
(Sacré nom d'un chien de fusil, je ne vais tout de même pas laisser le désespoir envahir mon royaume !)
et
“Eta orain, zer ordu pil pil ? Pilarik ez ? Pilak hil ? urtuak ? Erdi erdoiluak, hondartuak ? Ala ibai hormatu batean bainatu al naiz ? Nere ordulariak azken hatsa bota du. Arima han gora joan zaio. Bostak ? Tearen tenorea.”
(Quelle heure est-il ? Plus de pile ? Pile brûlée ? Liquéfiée ? Rouages rouillés, ensablés ? Ou bien me serais-je baigné dans une rivière glacée ? Ma montre a poussé son dernier soupir. Son âme est partie en fumée. Cinq heures , c'est l'heure du thé.)
La suite bientôt !
jeudi 9 septembre 2010
Lecture d'I SABLE
Dans le cadre des Journées européennes du Patrimoine au Musée départemental de Préhistoire d’Île-de-France, samedi 18 septembre à 18h :
Lecture de « I Sable » de Karin Serres
Lecture-rencontre organisée par la médiathèque départementale dans le cadre des « À Voix Vives ».
« I Sable » est une pièce écrite par Karin Serres lors de sa résidence d’écriture au musée en 2009.
Cette lecture est mise en voix par Anne Contensou.
Interprétée par Jean-Baptiste Anoumon, Gretel Delattre et Pascal Sangla. Durée : 45 minutes.
Entrée libre, à partir de 10 ans.
Sur réservation au 01 64 78 54 80 ou par e-mail : prehistoire@cg77.fr
Musée départemental de Préhistoire d’Île-de-France
48 avenue Etienne Dailly – 77140 Nemours
Tél. 01 64 78 54 80 – Fax : 01 64 78 54 89 – prehistoire@cg77.fr
vendredi 3 septembre 2010
Ode marítima
Saí com a sensação de que vivi um momento único. Fui tanto trespassada como, ao mesmo tempo, mergulhei no espactáculo. Porque falamos em palco ? Em palco, a linguagem é o nosso interior a saltar-nos para fora. É sensivel e sensitiva. É o que temos de mais íntimo e que partalhamos. É vital fazer teatro assim. Claude Régy fá-lo. O actor oferece a sua “carne” ao espectador. E enquanto dramaturga, isso é o que me importa mais. Transmite uma forma instinctiva de trabalho com a “carne” da voz, com o seu corpo. E visível como as palavras encheram o actor. Esta é a força da palavra em palco. Faz-me perceber por que escolhi o Teatro.
(Mes impressions sur “Ode maritime” pour “Ora diga-nos”, Folha Informativa n,°12, 15 juillet 2010)
jeudi 2 septembre 2010
Festival d'Almada
La vibration des mots sur le plateau
Quelle que soient les crises qui nous touchent, ce qui importe ce sont nos questionnements communs qui nous font aller de l’avant. Le festival d’Almada est l’un des lieux de questionnements artistiques les plus vivants et chaleureux que je connaisse et, comme l’an dernier, j’en suis repartie pleine d’énergie, d’émotions, de projets et de souvenirs forts : la langue portugaise/d’autres en écho, la vraie attention et disponibilité de toute l’équipe du TMA, l’instantané de la feuille du soir, les discussions sous les lampions-yeux de poissons, le bruit de mer des branches des arbres autour de la Casa de cerca, les nuits de Caparica trouées d’aboiements de chiens errants, l’humour et la réflexion de la rencontre avec Claude Régy à la cafétéria, le bleu mosaïque de ce théâtre debout contre le ciel, l’odeur du papier brûlé, la présence physique d’un cheval sur scène, le vertige du grand 8 projeté, manuel-manuel, le goût de la dorade grillée sous mes yeux, dans la fumée…
Mon grand choc théâtral, cette fois, a été “Ode maritime”, qui résonnait si fort avec les quais/cais réels, si proches, avec la langue portugaise et avec la lecture, quelques heures auparavant, des 10 chansons de Camoens par Luis Miguel Cintra. Une grande plongée dans la vibration et la chair des mots sur le plateau, dans cette relation fragile, éphémère et extraordinaire portée par la langue qui fonde notre théâtre vivant.
Comme le dit Vasco dans “Marzïa” : “la golova suit pas aussi vite que le corpo”, et je suis encore habitée par toutes ces sensations, malgré mon retour en France et le temps passé. Alors longue vie au festival d’Almada et au TMA…
mercredi 23 juin 2010
lundi 21 juin 2010
Délipéro des Papilles au Channel
Réveiller nos appétits
Je fonds devant tant de plaisir partagé entre enfants et adultes, autour des Papilles, ces explorateurs imaginaires partis de Blériot-Plage “à la recherche du meilleur goût du monde de toute la vie”. Lancée en octobre 2009, l’histoire s’est achevée ce soir, Saint Cornichon en Papillie, premier Délipéro au Channel, dans un festival de goûts, de mots et d’émotions reliés par cette fiction.
Toute la rencontre a été imaginée par les enfants du CM1 de l’Ecole de Virval. A 5 heures, collier de trombones de bienvenue autour du cou, bouquet d’herbes aromatiques à la main, les familles se sont assises dans le bistrot redécoré pour écouter chants et lecture de la correspondance entre Virgili, Vallèr et leurs enfants, puis goûter à tous les meilleurs goûts du monde de toute la vie découverts, inventés et cuisinés avec Marie-Jo toute l’année, jusqu’au génial CHOCO-CORNICHON (cf photo). Les grands frères et sœurs piétinaient devant le four à bois en disant : “moi aussi, je suis un Papillon !” ; les parents feuilletaient les cahiers du goût, visitaient l’expo, demandaient les recettes, se léchaient les doigts ; et les enfants faisaient le service et la visite du camp de base qu’ils avaient recréé avec amour, en grand costume national Papille qu’ils portaient tous fièrement pour l’occasion : chapeau exotique, tablier bleu, torchon à la ceinture et pansement au doigt…
Je voudrais que vous ayez pu assister à cet extraordinaire instant suspendu, un mois plutôt, lorsque nous leur avons expliqué que cette expédition qu’ils accompagnaient depuis le début de l’année était une histoire inventée pour eux. Ont suivi les deux plus belles minutes de silence que j’aie jamais entendues. Maîtresse comprise. Qui le savait. Nous les avons alors invités à nous rejoindre dans la création de cette expédition des Papilles, et ils ont tous replongé dans le plaisir de LEUR fiction, avec un élan décuplé.
C’est le défi du théâtre, aujourd’hui : renouer avec un plaisir accessible à tous, le plaisir de nos sens et des histoires inventées. Réveiller nos appétits. Réfléchir aux liens possibles entre les spectacles et le public, pour en inventer de nouveaux, plus surprenants, plus riches, plus actifs. Réveiller l’envie de nous retrouver. Les yeux brillants de tous ces enfants, leur moustache de tomate ou de chocolat, leur plaisir à remporter tablier bleu taché ou livret-souvenir et les sourires de leur famille, tous âges mélangés, vont nous y encourager.
mercredi 16 juin 2010
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